Le Président de la République a annoncé un plan de lutte contre la pauvreté, qui mobilisera 8 milliards d’euros sur 4 ans. Au coeur de ce plan, accompagnement et prévention pour que la pauvreté ne soit plus un cul-de-sac dans notre pays.
Les principales mesures annoncées
Parmi les mesures annoncées par le Président de la République ce matin :
- création de 30 000 places de crèche et incitation à la mixité sociale dans les établissements ;
- mise en place de tarifs sociaux dans les cantines scolaires ;
- distribution de petits-déjeuners gratuits dans les écoles défavorisées ;
- obligation de formation jusqu’à 18 ans pour tous les jeunes ;
- accompagnement des jeunes de l’ASE jusqu’à 21 ans et non plus 18 ;
- création de 500 000 garanties jeunes supplémentaires ;
- meilleur accompagnement des bénéficiaires du RSA vers l’emploi ;
- lancement d’un revenu universel d’activité en 2020 ;
- fusion de l’aide à la complémentaire santé et de la CMU …
6 générations en moyenne pour sortir de la pauvreté
Trop longtemps, la lutte contre la pauvreté s’est attachée uniquement à la question des moyens. Avec pour résultat qu’aujourd’hui, la France compte toujours 9 millions de pauvres et que, trop souvent, “quand on est pauvre, c’est parce qu’on naît pauvre”.
Ainsi, d’après l’OCDE, il faut 180 ans, soit 6 générations, pour sortir de la pauvreté. La pauvreté se transmet de génération en génération, et constitue un véritable déterminisme social.
“La pauvreté n’est pas une situation, c’est un combat”
Ces inégalités de destins, elles sont insupportables et pourtant, trop longtemps, la lutte contre la pauvreté s’est limitée à faire en sorte que l’on puisse vivre “un peu mieux” dans la pauvreté.
Ce plan, au contraire, vise à donner aux individus les moyens d’en sortir durablement, et surtout de ne pas y tomber. Une approche différente donc, mais qui ne fait pas l’impasse sur la nécessité de protéger les plus fragiles, avec l’augmentation des minima sociaux comme le minimum vieillesse, l’AAH ou le RSA, votée l’année dernière.
Le plan présenté aujourd’hui, construit à l’issue d’un an de travaux auxquels j’ai contribué en faisant émerger avec Antoine Dulin la proposition d’allonger la période de formation obligatoire jusqu’à 18 ans, vise ainsi à dépasser cette logique de moyens qui n’a pas réussi à faire ses preuves.
Ainsi, s’il faut se satisfaire des moyens très conséquents alloués à ce plan de lutte contre la pauvreté – plus de 8 milliards d’euros sur 4 ans (le dernier plan, présenté sous François Hollande, était de 2 milliards) – il ne faut pas y voir là une finalité, mais bien un moyen .
Pas un plan pour que les personnes pauvres vivent mieux pauvres. Mais pour qu’elles en sortent et n’y retombent plus.
Le Président a donc annoncé aujourd’hui une série de mesures pour briser les déterminismes sociaux en misant sur l’accompagnement et la prévention, avec un focus en particulier sur les jeunes qui sont les premières victimes de la pauvreté en France.
Petite-enfance : 30 000 places de crèche, mixité sociale, petits-déjeuners gratuits, tarifs sociaux dans les cantines
Les inégalités sociales se construisent dès la petite enfance. Ainsi, si 22% des enfants dits “favorisés” sont accueillis en crèche, c’est le cas pour seulement 5% des enfants “défavorisés”. Avec, en conséquence, des difficultés pour l’insertion professionnelle des parents ou la mixité sociale.
Le Président a ainsi annoncé la création de 30 000 places de crèche et la mise en place d’un “bonus mixité sociale” afin de favoriser la mixité dans les établissements.
Dans les zones défavorisées, des petits-déjeuners gratuits seront distribués dans les écoles pour éviter aux élèves d’arriver “le ventre vide” (15% des élèves sont concernés). Des tarifs sociaux pour les cantines seront généralisés pour permettre aux enfants de familles modestes de bénéficier de repas à partir d’un euro.
Insertion des jeunes : obligation de formation jusqu’à 18 ans, extension de la garantie jeunes, interdiction des “sorties sèches” de l’aide sociale à l’enfance
C’est une mesure que nous avions proposée avec Antoine Dulin dans le cadre de notre rapport remis en mars à la ministre de la Santé : la création d’une obligation de formation jusqu’à 18 ans pour tous les jeunes.
L’objectif de cette mesure, qui faisait consensus sur le terrain lors de nos travaux, est d’éviter que des jeunes se retrouvent à 16 ou 17 ans hors des radars, sans qualification.
Ils sont 100 000 aujourd’hui chaque année et, si l’on ne fait rien, ces jeunes seront les pauvres de demain.
Depuis 1959, l’obligation portait uniquement sur l’instruction jusqu’à 16 ans. Depuis, la France a bien changé : le taux de chômage n’est plus de 2% et trouver un emploi pour s’insérer dans la société n’est pas facile. C’est pourquoi il est essentiel d’équiper tous les jeunes d’un bagage de compétences et qualifications, avec cette obligation de se former jusqu’à 18 ans.
Pour cela, il s’agira de renforcer l’accompagnement sur le terrain et de “resserrer les mailles du filet”, via un réalignement des rôles et missions des acteurs locaux, comme les missions locales. Par exemple, ces dernières seront désormais dans l’obligation de proposer un rendez-vous et une solution aux jeunes décrocheurs, plutôt que de les informer de leurs droits uniquement, comme c’est le cas aujourd’hui.
Enfin, cette mesure s’attache à la “formation” et pas seulement à “l’instruction” en misant tout autant sur les filières générales que sur la formation professionnelle, l’apprentissage, les micro-lycées ou les écoles de production. Chaque jeune doit pouvoir s’y retrouver.
Dans cette même optique, le Président a par ailleurs annoncé l’extension de la Garantie jeunes, un dispositif qui a fait ses preuves, à 500 000 jeunes supplémentaires.
Enfin, il est essentiel d’apporter un soutien particulier aux jeunes qui sont les plus vulnérables, et notamment ceux qui sont issus de l’aide sociale à l’enfance.
En France, un quart des sans-abri ont eu un parcours par l’ASE. Le Président, dans la lignée des travaux que nous avions pu conduire à l’Assemblée nationale, a annoncé l’interdiction des sorties sèches de l’ASE, c’est à dire qu’il sera de la responsabilité de l’autorité publique de proposer des solutions à ces jeunes lorsqu’ils atteignent la majorité.
Mieux accompagner les bénéficiaires du RSA vers l’emploi
Le plan annoncé aujourd’hui entend accompagner plus efficacement les bénéficiaires du RSA, alors qu’aujourd’hui ils sont 50% à ne pas être accompagnés vers l’emploi au bout de 6 mois. Ainsi, aujourd’hui, la moitié des bénéficiaires du RSA le sont depuis au moins 4 ans.
Dorénavant, les dossiers seront instruits dans un délai d’un mois maximum afin qu’une solution de formation ou d’emploi soit proposée.
Le lancement d’un “revenu universel d’activité” en 2020
Aujourd’hui, le système d’aides sociales en France est très complexe, ce qui a pour conséquence d’augmenter le taux de non-recours, c’est à dire que certaines personnes ne demandent pas des aides auxquelles elles ont pourtant droit.
C’est pourquoi le Président a annoncé le lancement d’un travail pour fusionner des minima sociaux au sein d’une aide unique : le “revenu universel d’activité”. L’objectif est de le déployer en 2020.
Enfin, au niveau de la santé, l’aide à la complémentaire santé (ACS) et la CMU vont être fusionnées.
Des mesures complémentaires avec notre action depuis 16 mois
Ces mesures étaient attendues et sont le fruit d’un grand travail de concertation avec les acteurs de terrain et les personnes en situation de fragilité.
Mais elles ne sont bien sûr pas les seules car la lutte contre les inégalités de destin est une priorité absolue.
C’est pourquoi nous avons lancé le dédoublement des classes en zones d’éducation prioritaire.
C’est pourquoi nous avons lancé une réforme de la formation, afin que chacun puisse se former tout au long de sa vie, et injecté 15 milliards d’euros pour former 1 million de jeunes et 1 million de personnes éloignées de l’emploi.
C’est pourquoi nous rendons l’instruction obligatoire dès 3 ans.
C’est pourquoi nous avons augmenté le minimum vieillesse, l’allocation adultes handicapés dans des proportions inédites.
Il nous faudra continuer. “Faire plus pour ceux qui ont moins” car il n’est pas acceptable que la pauvreté soit une fatalité dans notre pays.