Retrouvez ci-dessous la question écrite que j’ai adressée au Gouvernement au sujet de l’usage détourné des mortiers d’artifice, et la réponse qui lui a été apportée. Pour consulter l’intégralité de mes questions écrites, rendez-vous sur le site de l’Assemblée nationale.
Question posée à M. le ministre de l’intérieur le 04/08/2020
Mme Fiona Lazaar attire l’attention de M. le ministre de l’intérieur sur l’usage détourné des mortiers d’artifice lors d’épisodes de violences urbaines, à l’encontre des forces de l’ordre notamment. Ces artifices de divertissement sont soumis à de nombreuses réglementations nationales et communautaires qui visent d’une part à en encadrer la vente, le transport et la distribution de ces produits et d’autre part leur détention et leur usage. Un agrément spécifique est ainsi nécessaire pour utiliser les artifices de catégorie F4, parmi lesquels figurent les mortiers. Ces dernières années, le détournement de l’usage de ces mortiers a largement progressé et ils sont aujourd’hui régulièrement utilisés comme arme par destination lors des épisodes de violences urbaines, mettant en danger l’intégrité physique et la vie des forces de l’ordre qui interviennent, ainsi que de ceux qui les manipulent. Aujourd’hui, elle souhaite alerter sur cette situation et souligner l’enjeu important de renforcer les moyens de contrôle et de réglementation de ces artifices. Il est en effet aujourd’hui relativement aisé de se procurer de tels artifices, malgré la réglementation qui s’est considérablement durcie depuis 15 ans. En particulier, il a été constaté qu’il est facile d’acquérir ces produits en ligne. De nombreux sites internet mettent en vente ces mortiers d’artifices sans effectuer de contrôle, la détention de l’agrément C4 n’étant en pratique pas demandée aux acheteurs. En outre, il reste plus aisé de se procurer ce type de produits dans des pays frontaliers membres de l’Union européenne où la réglementation est moins stricte. Mme la députée souligne l’urgence à apporter une réponse opérationnelle à cet enjeu qui est une préoccupation du quotidien pour les forces de l’ordre sur le terrain mais aussi pour les habitants de certains quartiers de banlieue, otages d’épisodes extrêmement violents. La sécurité des habitants est la première des libertés ! Elle souhaiterait ainsi connaître les actions qu’entend mener le Gouvernement pour mieux encadrer l’import de ce type de produits, en coopération étroite avec les autre États européens, davantage responsabiliser les opérateurs économiques et enfin pour mieux sanctionner l’usage détourné de ces artifices.
Réponse du gouvernement en date du 08/12/2020
L’emploi de feux d’artifices détournés de leur emploi festif pour devenir des projectiles utilisés contre les forces de l’ordre, parfois à l’aide de tubes plus communément appelés « mortiers » est un sujet au coeur des travaux du Gouvernement. Rappelons que les artifices de divertissement sont classés par l’article R. 557-6-3 du code de l’environnement en quatre catégories (F1, F2, F3 et F4) selon leur dangerosité par ordre croissant et que leur port et transport sans motif légitime sont réprimés de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende (article L. 2353-10 du code de la défense). Est, par ailleurs, sanctionné d’une peine d’amende prévue par des contraventions de 5ème classe le fait pour un commerçant de vendre des feux d’artifices soit à des personnes ne détenant pas un certificat de formation ou une habilitation nécessaire à l’acquisition de certains types de matériels classés dans des catégories particulières, soit à des personnes n’ayant pas l’âge requis pour l’achat de certains articles. La même sanction est prévue pour réprimer le fait de manipuler ou utiliser certains articles pyrotechniques sans être titulaire des autorisations nécessaires. Si la réglementation des artifices s’inscrit dans un cadre européen (directive européenne n° 2013/29/UE du 12 juin 2013 relative à l’harmonisation des législations des États membres concernant la mise à disposition sur le marché d’articles pyrotechniques) qui pose comme principe l’absence d’interdictions ou d’entraves à leur mise à disposition sur le marché, la France a fait le choix, pour des raisons d’ordre et de sécurité publique et dans le respect des règles communautaires, d’adopter des mesures plus restrictives. Ainsi, n’est autorisé l’achat d’artifices de catégorie F2 qu’à partir de l’âge de 18 ans (alors que la directive européenne le permettait dès l’âge de 16 ans) et a complété l’encadrement des mortiers de catégorie F4 par l’obligation pour le titulaire d’un certificat de qualification d’obtenir un agrément délivré par le préfet, après enquête de moralité (décret n° 2019-540 du 28 mai 2019 relatif à l’agrément technique des installations de produits explosifs et à la mise en œuvre d’articles pyrotechniques). Afin de lutter contre le détournement de ces feux d’artifices et à la suite de l’attaque du commissariat de Champigny-sur-Marne survenue le 10 octobre 2020, le ministère de l’Intérieur a annoncé des mesures répressives et préventives lors de l’examen de la proposition de loi sur la sécurité globale, notamment en ce qui concerne la vente par internet. Certains pays disposent en effet d’une législation plus souple permettant la vente en ligne d’articles dont l’acquisition est strictement réglementée en France. L’aggravation de la répression pourrait, par ailleurs, se traduire par la transformation des incriminations contraventionnelles du code de l’environnement en délits punis d’une peine d’emprisonnement, permettant ainsi le placement en garde à vue des mis en cause ainsi que des perquisitions de nature à conduire à la saisie éventuelle d’autres articles prohibés. Pour l’heure, au plan opérationnel, les forces de l’ordre en lien avec les autorités préfectorales et judiciaires et avec l’appui d’équipes cynophiles spécialisées dans la détection des armes, poudres et munitions, mettent régulièrement en place des contrôles de personnes et de véhicules, notamment avant les périodes de festivités, afin de faire respecter la réglementation édictée par le code de l’environnement et les arrêtés préfectoraux qui peuvent, dans un espace-temps limité, interdire la vente et le transport d’articles pyrotechniques. En outre, des vérifications sont souvent faites, en accord avec les bailleurs sociaux et syndics de copropriété, dans les parties communes et sur les toits de certains immeubles, qui peuvent servir de lieux de stockage des feux d’artifices. Enfin, la recherche du renseignement au travers de sources humaines et la veille sur internet sont des axes d’effort qui doivent être poursuivis. Au plan pénal, lorsque des personnes sont blessées par des tirs de mortiers et que des biens publics sont dégradés, les enquêtes sont généralement diligentées, sous le contrôle du parquet, par des unités spécialisées en matière de police judiciaire. Outre une attention particulière aux opérations de police techniques et scientifiques, les gendarmes et policiers en charge des investigations effectuent une enquête d’environnement poussée afin d’identifier d’éventuels témoins et exploitent les images de vidéo-protection. En matière d’incrimination, l’utilisation de mortiers contre des gendarmes ou des policiers est assimilée à l’usage d’une arme et peut conduire à aggraver les peines encourues et à retenir des qualifications pouvant aller jusqu’à la tentative d’homicide, si la volonté de tuer ainsi que la préméditation sont établies. Ce sont toutefois plus fréquemment des faits de violences avec armes sur dépositaires de l’autorité publique qui sont retenus.
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